Reconversion du site de Caterpillar : tous les détails
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Ce vendredi 2 février, je participais en qualité d’échevin des entreprises et des indépendants à la rencontre presse visant à faire le point sur l’état d’avancement du dossier de reconversion du site de Caterpillar. 

Voici, sous forme de questions réponses quelques éléments sur l’état du dossier. N’hésitez pas à revenir vers moi pour toute question complémentaire via ma boîte eric.goffart@charleroi.be. 

Quel était l’objet de la conférence de presse de ce jour? 

Il s’agissait, pour la Région wallonne, la Ville de Charleroi et l’intercommunale Igretec, de faire le point sur le dossier de reconversion du site de Caterpillar, à Gosselies. 

Pourquoi doit-on reconvertir ce site ? 

Comme le savent tous les Carolos, l’entreprise américaine Caterpillar a exploité le site de Gosselies depuis 1965, jusqu’à l’annonce de sa fermeture, par le groupe américain, le 2 septembre 2016. L’annonce de sa fermeture a été un coup de tonnerre dans le ciel carolo, à la veille de la célébration des 350 ans de la fondation de notre ville. Depuis cette date, les responsables politiques et économiques de la région de Charleroi et de la Région wallonne planchent sur un avenir porteur pour cet espace, et pour tout le bassin économique qui l’entoure.

Comment a-t-on réagi à l’annonce de la fermeture de Caterpillar ? 

Cette annonce a été un choc social considérable pour toute la région de Charleroi. 2246 emplois ont été perdus, chez Caterpillar et ses sous-traitants. Sans compter l’onde de choc sur l’ensemble des entreprises du tissu économique de notre région qui, directement ou indirectement, avaient des liens étroits avec l’entreprise. Il fallait donc que les partenaires politiques et économiques réagissent vite et fort. Cela s’est fait directement et durablement par une concertation de l’ensemble des acteurs locaux et régionaux, au travers du plan Catch notamment, et plus largement au niveau de la concertation permanente du Comité de développement stratégique de Charleroi Métropole.

Qu’a-t-on fait face à ce drame social ?

Au niveau de l’emploi, des cellules de reconversion ont immédiatement été mises en place. Celles-ci ont accueilli 1854 personnes licenciées par Caterpillar et par ses sous-traitants, soit 83 % des 2246 licenciés au total. Lorsque les cellules de reconversion ont achevé leur travail, en avril 2019, on a pu constater que 1192 personnes ayant participé aux cellules de reconversion avaient retrouvé un emploi, soit 64 % des 1854 personnes inscrites. 

En ce qui concerne le site industriel, où en est-on ?

Entre le 2 septembre 2016 et aujourd’hui, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, précisément sept ans et cinq mois, soit 2709 jours. 

Ce dossier a été l’une des priorités majeures des trois gouvernements wallons et des deux collèges communaux successifs. Aussi bien au niveau régional qu’au niveau communal, toutes les familles politiques ont donc pu, d’une manière ou d’une autre, soutenir ce dossier transversal.

Un long cheminement, fait d’opportunités, de pistes de travail explorées puis abandonnées, a conduit à une approche stratégique nouvelle, pragmatique et réaliste, dont les prochaines étapes très concrètes vont enfin pouvoir être franchies au cours des prochains mois. Les Carolos vont, enfin, voir concrètement évoluer ce site emblématique.

Quelle a été la première étape ?

La toute première étape a été de récupérer, pour un euro symbolique, en mars 2017, la propriété sur l’ensemble du site concerné. C’était absolument fondamental, dans la mesure où de nombreux sites industriels, abandonnés par leur occupant historique ont trop souvent été laissés à l’abandon et sont devenus des friches, faute pour les pouvoirs publics de parvenir à en acquérir la maîtrise. 

À partir du moment où les pouvoirs publics ont gardé la maîtrise du site, il a été possible de le sécuriser, d’assurer la maintenance, et de maintenir une certaine activité à titre précaire, ce qui a permis, au cours de ces sept dernières années d’éviter qu’il s’effondre complètement. 

La maintenance de ce site a coûté de l’argent public au cours des dernières années ?

La maintenance d’un tel site a bien entendu des coûts, mais elle a également permis de générer quelques recettes. Une série de recettes ont été perçues suite à une activité économique qui s’est déroulée à titre précaire au cours des dernières années (stockage, organisation d’événements).

Par ailleurs, des recettes extraordinaires ont pu être extraites de la valorisation d’éléments industriels du site qui avaient été laissés sur place par l’opérateur économique précédent et qui pouvaient être valorisés à l’international, pour des activités du même type (ponts roulants, matériel industriel lourd, etc.)

On a laissé le site sous cocon pendant plusieurs années pour pouvoir le valoriser au mieux. Mais pour y faire quoi ? De l’industrie ?

C’est tout l’objet du cheminement des pouvoirs publics au cours des sept dernières années.

Dans un premier temps, l’idée a été de trouver un oiseau rare, à l’international. Un très gros opérateur économique, de stature mondiale, qui pourrait bénéficier de l’immense potentiel du site lui-même, de sa localisation et de sa main d’œuvre historique et de son expérience métier, pour y installer une activité de type industriel de grande ampleur.

C’est dans cette perspective qu’un premier projet a été présenté, avec Thunder Power, un fabricant chinois de voitures électriques, de construire de nouvelles chaînes de production à Charleroi. Quand on voit l’essor annoncé des petites citadines électriques dans la mobilité de demain, ce projet avait un véritable sens économique. L’Echo l’annonçait encore récemment : “dès 2025 l’Europe pourra produire des voitures électriques à moins de 25.000 euros avec des autonomies de 300 km”, et concurrencer les voitures chinoises, issues d’une économie qui, vu son développement dans l’industrie des batteries, est très compétitive sur ce secteur.

Malheureusement, pour des raisons liées à l’évolution de la situation économique internationale et des enjeux géopolitiques, ce dossier ne s’est pas concrétisé. 

Au développement industriel à succédé l’idée d’implanter des activités dans le secteur du divertissement ?

Oui, c’est une affectation qui n’avait pas été prévue par le plan Catch (qui visait les activités de manufacture avancée, des biotech, de la logistique, et du numérique), mais qui a fait rêver toute notre région. “Un Legoland à Charleroi !”

Le groupe Merlin, propriétaire des parcs d’attractions Legoland, avait pour objectif de déployer à Gosselies l’un de ses plus grands parcs d’attractions dans le monde. 

Là aussi le projet avait été annoncé au grand public, et malheureusement, là aussi il a fallu y renoncer, exclusivement pour des raisons de réorientation stratégique du groupe, suite à la désignation d’un nouveau CEO. 

Peut-on reprocher aux autorités publiques d’avoir communiqué trop rapidement sur ces deux dossiers, finalement avortés ? 

Sans rentrer dans les choix de communication individuels et collectifs qui ont été faits à chaque étape antérieure de ce dossier, je pense que les autorités publiques essaient sincèrement de bien faire et de donner un cap. C’est ce qu’on attend d’elles. 

Dans ce type de projets, depuis les premiers contacts qui conduisent à la construction progressive du dossier, jusqu’à l’ouverture d’installations nouvellement construites et la coupure d’un ruban, il y a énormément d’étapes à franchir. Ce sont des parcours longs, complexes et incertains.

Il est très important, dans ce type de dossiers emblématiques, de communiquer à chaque étape, vis-à-vis du grand public, qui mérite d’être informé, mais de le faire avec mesure, compte tenu des aléas qui pèsent sur chaque dossier. Ce n’est pas du tout évident, il faut le reconnaître.

Quelles leçons tirer de l’échec des options Thunder Power, puis Legoland ?

Le fait d’avoir, pendant près de sept ans et demi travaillé de manière approfondie, aux différents niveaux de pouvoir, autour de ce dossier a permis d’avoir une connaissance détaillée, des très grands avantages et mais aussi des inconvénients que présente ce site et de son potentiel réel à l’échelle nationale et internationale. 

Cela permet aujourd’hui de pouvoir avancer sur une offre nouvelle, plus pragmatique, et à certains égard plus qualitative. Cela a également permis de fermer certaines portes.

Le monde a beaucoup changé depuis le 2 septembre 2016. Est-ce que cela peut avoir une incidence sur les choix stratégiques relatifs au développement de ce site ? 

Depuis 2016, de très nombreux changements importants se sont produits à l’échelle européenne et mondiale et tendent à encourager à la concentration géographique des chaînes de valeur. On peut citer la guerre en Ukraine, le blocage du canal de Suez par l’Ever Given en 2021 et son impact sur le trafic maritime mondial, les enjeux environnementaux qui nous invitent à raccourcir les chaînes de production, etc.

Tous ces éléments nous incitent à travailler plus directement avec des partenaires et des investisseurs wallons, belges et européens, autant que possible. Des partenaires qui partagent également avec nous une certaine vision de l’économie sociale de marché et du respect de l’environnement.

La réflexion a-t-elle également évolué sur le type d’activités à organiser sur le site ?

Dans un premier temps, le réflexe naturel était de chercher à accueillir des activités strictement industrielles, c’est ce qu’on connaît à Charleroi, c’est historiquement le cœur d’activité de notre territoire. 

Mais l’intérêt du groupe Merlin pour le site, même s’il n’a pas abouti aux objectifs espérés, a démontré que cette fonctionnalité économique du divertissement (“entertainment”) avait toute sa pertinence sur notre territoire, ce qui a d’ailleurs été confirmé par différents opérateurs phares du secteur. 

Il a d’ailleurs été confirmé que les éditions Dupuis avait répondu à la première phase de l’appel à manifestation d’intérêts, en vue de réfléchir à la création d’un parc Spirou à cet endroit. On verra si cet opérateur maintient son dossier au cours des prochaines phases, mais il confirme en tout cas l’attractivité du site pour du divertissement. Le succès de l’organisation de la foire de Charleroi à titre exceptionnel et précaire sur ce site au cours des dernières années, tend également à confirmer cette idée.

Aujourd’hui, l’objectif est de restructurer le site et de sélectionner plusieurs projets pour l’occuper ?

C’est exactement ça. Un changement de cap a été décidé, avec pragmatisme. Il s’agit de définir plusieurs affectations prioritaires pour le site et de sélectionner les meilleurs projets pour s’y installer. Tout ça va être organisé de manière très méthodique.

Comment envisage-t-on de structurer ce site ?

Le plan guide qui vient d’être validé donne une orientation générale pour l’ensemble du site. Ce n’est pas un document liant qui contraint les autorités publiques à procéder à tel ou tel choix, mais c’est un document de référence qui donne des lignes directrices qui devraient être suivies par tous les opérateurs.

L’idée est de pouvoir diviser le site et de connecter les différentes parties du site entre elles, vis-à-vis de l’extérieur, au départ des besoins qui seront identifiés. Le site sera structuré en trois blocs ou zones. Une zone pour la partie Ouest du site, une zone pour la partie centrale et une zone pour la partie Est.

Que trouvera-t-on sur chacune des zones du site ?

La zone Ouest, très visible depuis la N5, serait affectée au secteur des loisirs.

La zone centrale serait dédiée à la logistique et à la production. Vu la situation géographique du site, il y a une énorme demande dans le secteur de la logistique. Quand on parle de logistique et de transports, on parle également de logistique augmentée, très porteuse au niveau d’emploi. Celle-ci intègre une série d’activités de services comme le packaging, la division des produits et la manutention. Ces activités peuvent représenter une activité extrêmement intensive en termes de main-d’œuvre. 

La partie Est porterait sur de l’industrie et sur les biotechs, en lien direct avec l’Aéropole et le Biopark, en plein essor. Sur ce Biopark, le bâtiment Biotech 4 sera inauguré dans les jours qui viennent. Le chantier du Biotech 5 est en cours, et il y a encore la place pour un bâtiment Biotech 6. Mais il est important, vu l’importance de ce secteur de pointe dans notre environnement économique, de réserver des espaces nouveaux, sur le site de Caterpillar, en vue d’anticiper des besoins d’extensions futures du Biopark. 

Comment se présentera le site vis-à-vis de l’extérieur ?

Il y a une volonté de figer le site sur sa frontière Nord et sur sa frontière Sud. Ces deux frontières offriront un front bâti vis-à-vis de l’extérieur. 

La frontière Nord permettra, au départ de la circulation autoroutière sur la E42, de donner un repère visuel attractif du dynamisme et économique de Charleroi. Sur la limite Sud du site, un nouveau front bâti permettra de donner une perspective sur l’avenue des États-Unis, axe important de circulation vers l’Aéropole. 

L’important est d’avoir une connectivité efficace Est-Ouest. À l’Est en vue d’intégrer ce site d’activité économique avec celui de l’Aéropole, mais surtout, à l’Ouest, avec le centre de Gosselies. 

Il s’agira donc d’un site d’activités économiques ouvert vers l’extérieur ?

Absolument. L’objectif de la reconfiguration est également d’ouvrir ce nouveau moteur économique vers la ville et ses fonctions, et singulièrement vers le centre de Gosselies, ce qui aura immanquablement un effet sur la redynamisation du commerce et de l’horeca au centre de Gosselies. 

Comment sera structuré le site en interne ?

Deux grandes voies vertes se croiseront au centre du site avec une voie Nord-Sud et une voie Est-Ouest qui auront pour objectif de garantir la connectivité et la mobilité sur l’ensemble du périmètre et d’assurer des continuités écologiques au travers de ce site en contribuant à la préservation de la biodiversité. 

Concrètement, comment les choses vont-elles maintenant se passer pour les entreprises intéressées ?

Un appel à manifestation d’intérêt a été lancé il y a quelques mois. 35 entreprises se sont manifestées pour occuper le site avec des maturités et des temporalités différentes, mais dans tous les cas avec l’envie de développer un projet sur le site. 

Après cette phase exploratoire, les autorités publiques lancent aujourd’hui un appel à projet liant. Il est demandé aux 35 entreprises qui se sont déjà manifestées, voire à d’autres entreprises, de confirmer formellement leur intérêt pour le site. 

Quel est le délai pour que les entreprises déposent cet appel à projet liant ?

Les réponses à cet appel à projet sont attendues pour la fin avril.

Qui peut rentrer un projet ? 

Toute entreprise apte à déposer dans ce délai très court un projet sérieux, construit et en phase avec le plan guide. Le projet sera examiné en fonction de critères déterminants comme la cohérence avec le plan guide, le volet financier et les objectifs en termes d’emploi.

Quels objectifs en termes d’emploi ?

C’est très difficile à dire, compte tenu de la variété des activités possibles. Il est évident que le nombre d’emplois dépend du type d’activité envisagée, et cette négociation aura lieu dans le cadre de l’appel à projets.

Mais si l’on prend quelques points de comparaison à proximité, sur le zoning de Courcelles, on est sur un ratio de 15 emplois à l’hectare et à l’Aéropole, un ratio de 45 emplois à l’hectare. L’objectif est évidemment, à terme, d’atteindre un nombre d’emplois supérieur au nombre de postes de travail de Caterpillar sur le site. 

Quelles sont les caractéristiques générales du site ? 

C’est un site de 93 hectares qui comprend 25 hectares de bâti. C’est un site extrêmement minéralisé qui comprend aujourd’hui trois immenses bâtiments, ce qui est très contraignant dans une perspective de restructuration du site. 

Que peut-on tirer du bâti existant ? 

Concrètement, une grande partie des bâtiments existants ne correspond pas aux nouveaux standards de construction et aux différents besoins de l’installation de nouvelles activités économiques. 

Le site est-il pollué ? 

Il y a des spots de pollution au niveau de l’eau et au niveau du sol. Rien de grave qui entrave la reconfiguration du site, mais ces pollutions doivent être traitées, comme dans tout projet immobilier. 

À ce stade, les études d’orientation et de caractérisation sont terminées. 

A combien s’élève la dépollution ?

Les coûts liés à la dépollution du site seront précisés par la suite, en fonction des affectations précises des parcelles.

On estime aujourd’hui les coûts de la dépollution à une somme comprise entre 15 et 20 millions d’euros. 

Qui va payer les opérations de dépollution ? 

Une partie sera payée grâce à une caution de 5 millions prévue au moment du départ de Caterpillar à charge de l’entreprise. Pour le reste, une enveloppe de 10 millions a été prévue dans le cadre de la dernière programmation Feder. 

Va-t-on avancer sur l’ensemble du site en même temps pour sa reconversion ? 

Le site sera traité par lots, vu sa taille importante. 

Quels sont les objectifs au plan environnemental ? 

Le projet a l’ambition de rétablir les écosystèmes naturels et de veiller à une perméabilité des sols aussi importante que possible.

Va-t-on garder tous les bâtiments actuels ? 

Non, certains d’entre eux seront démolis parce qu’ils ne correspondent pas aux besoins actuels du développement économique du site. 

Il y a une volonté de garder une trace de l’histoire industrielle du site et de valoriser les bâtiments qui peuvent l’être. On envisage le maintien potentiel de la grande halle, du château d’eau et du bâtiment central. Les autres seront démolis. 

Quelles sont les prochaines étapes pratiques au niveau des démolitions ? 

Au niveau de la démolition des bâtiments, il faut obtenir des permis de démolition et passer des marchés publics de travaux avec des entreprises spécialisées, en vue de lancer les opérations dans les meilleurs délais. 

Quelles sont les prochaines étapes au niveau de l’affectation des sols ?

L’ensemble du site est situé en zone industrielle. Si on veut en modifier l’affectation en termes d’aménagement urbain, par exemple pour y déployer des activités de loisirs, il est indispensable de procéder à des réaffectation au plan de secteur. 

Ces procédures sont assez longues et elles seront dès lors lancées dans les meilleurs délais. 

Quelles sont les prochaines étapes au niveau de la sélection des projets ? 

On va procéder à une sélection qualitative. Il faudra trouver des candidats capables de prouver la qualité de leur projet et leur capacité à le mettre en œuvre au plan financier, au plan technique etc. Il y aura également un débat important sur le nombre d’emplois projetés. 

D’où viennent les marques d’intérêt actuellement ? 

De Belgique et de France principalement, donc des acteurs plus proches de chez nous que les acteurs précédemment annoncés. La porte reste, à ce stade, ouverte pour de nouvelles manifestations d’intérêts, mais il est peu vraisemblable que ces investisseurs potentiels viennent du bout du monde. En toute hypothèse, l’Awex continue à faire partie des partenaires structurels.

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